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mardi 24 février 2015

Les termitières, dernier refuge des plantes face au désert


Les termites sont souvent considérés comme des « ingénieurs des écosystèmes ». Ce titre, qu’ils partagent avec d’autres animaux comme les lombrics, les castors ou les coraux, fait référence à l’ampleur des modifications qu’ils apportent à leur environnement. Une nouvelle étude vient d’étendre un peu plus les effets que l'on attribue à ces insectes : leurs constructions ralentiraient la progression des déserts. Dans les régions arides comme les savanes africaines, les termitières offrent en effet un substrat particulièrement accueillant pour la végétation. Par rapport au reste du sol, les nutriments y sont plus accessibles et l’eau y pénètre plus facilement. 
Des zèbres broutent les herbes poussant à la surface d'une termitière au Kenya (cliché Robert Pringle, avec son aimable autorisation).

Les nids de termites constituent ainsi de véritables refuges pour les plantes lorsque les précipitations diminuent. Des modèles mathématiques montrent que la végétation qui s’y trouve sera la dernière à succomber en cas de sécheresse sévère, et la première à renaître quand les conditions redeviennent plus clémentes. Indirectement, les termites diminueraient les risques de désertification totale. Il serait donc nécessaire de prendre en compte ce phénomène au moment d’analyser les images satellites des régions arides, afin de mieux estimer la progression des déserts et ses conséquences pour les populations humaines.
Depuis le ciel, ces termitières du Mozambique apparaissent comme des îlots de végétation luxuriante au milieu d'un océan de terre nue (cliché R. Pringle, avec son aimable autorisation).


Référence : Bonachela J. A., Pringle R. M., Sheffer E., Coverdale T. C., Guyton J. A., Caylor K. K., Levin S. A., Tarnita C. E., 2015 – “Termite mounds can increase the robustness of dryland ecosystems to climatic change”, Science 347: 651-654 (doi: 10.1126/science.1261487).

Julien Grangier

mardi 17 février 2015

Le camouflage des araignées-crabes a ses limites


Pour chasser en toute discrétion, certaines araignées sont capables de changer de couleur selon les fleurs sur lesquelles elles se mettent à l'affût. Le passage d’une couleur à une autre ne se ferait pourtant pas toujours si facilement, selon une nouvelle étude publiée dans Ecological Entomology. Le phénomène a été observé chez Misumenoides formosipes, une araignée-crabe d’Amérique du Nord dont les femelles peuvent être blanches ou jaunes. Le long des lisières forestières, 96% d’entre elles sont de la même couleur que les fleurs sur lesquelles elles reposent.
La couleur des femelles de Misumenoides formosipes est assortie à celle de leur support (clichés David Hill).
Une expérience a permis de comprendre d’où venait cette correspondance quasi parfaite. Les chercheurs ont d’abord transféré des araignées blanches sur des fleurs jaunes. Ils ont constaté que la plupart devenaient complètement jaunes en l’espace de trois jours seulement. Cette transformation s’accompagne d’une nette hausse de leur taux de capture de proies, renforçant l’idée que ce camouflage rend les affûts bien plus fructueux
En revanche, des araignées jaunes déposées sur des fleurs blanches ont réagi différemment. Plutôt que d’adopter la couleur de leur nouvelle cachette, presque toutes ont déménagé en l’espace de quelques heures. Les très rares qui sont restées n'ont opéré leur transformation que très lentement: la dernière à partir, au bout de deux semaines, n'était toujours pas complètement blanche. Cela suggère que les mécanismes biochimiques impliqués dans le passage du jaune au blanc sont énergétiquement bien plus coûteux que ceux permettant de virer du blanc au jaune. Ces coûts variables et leurs inconvénients en cas de couleurs dépareillées expliqueraient en partie pourquoi changer de couleur reste un phénomène rare dans le monde animal. 


Référence : Anderson A. G., Dodson G. N., 2014 – “Colour change ability and its effect on prey capture success in female Misumenoides formosipes crab spiders”, Ecological Entomology, doi: 10.1111/een.12167.

Julien Grangier