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vendredi 17 février 2012

La biodiversité en Île-de-France décline à grande vitesse


La huppe fasciée ne niche plus que dans le sud de la région. Moins
de dix couples subsistent en Île-de-France. (photo Georges Olioso)

On connaît principalement la fameuse liste rouge de l’UICN pour ces espèces rarissimes en danger d’extinction, souvent à l’autre bout du monde, comme le rhinocéros de Java ou le cheval de Przewalski. Mais l’Union internationale pour la conservation de la nature a voulu également prendre en compte le milieu urbain dans ses analyses.
C’est ainsi que, ces dernières semaines, plusieurs études sont venues faire le point sur la biodiversité dans les grandes villes, et notamment à Paris et en Île-de-France. Pas de surprise : celle-ci ne se porte pas franchement comme un charme. Natureparif, l’agence régionale pour la nature et la biodiversité, a ainsi calculé qu’une espèce d’oiseaux nicheurs sur quatre est menacée en Île-de-France. Pourquoi les oiseaux nicheurs ? Il sont plus représentatifs et plus facile à comptabiliser que les oiseaux hivernants et/ou migrateurs.

Le bruant jaune, encore bien répandu dans les campagnes franciliennes, a vu sa population diminuer de 20% en dix ans. A ce rythme, il pourrait être considéré comme "vulnérable" lors de prochaines éditions des listes rouges. (photo Denis Attinault)

D’ores et déjà, une dizaine d’espèces ont disparu de la région. C’est le cas de plusieurs oiseaux vivant dans les zones humides, en voie de disparition en Île-de-France. La bécassine des marais, le râle des genêts ont ainsi quitté la région. Le dernier butor étoilé s’est éteint il y a environ une quinzaine d’années.
Pas beaucoup mieux loties sont les espèces considérées en “danger critique d’extinction” comme le busard des roseaux ou la sterne naine. Ceux-là ne disposent plus que de quelques dizaines de couples nicheurs, parfois moins. Leur sort semble jeté. C’est ainsi que sur les 151 espèces d’oiseaux nicheurs recensées dans la région capitale, 39 sont considérées – selon les critères de l’UICN – comme “menacées”. Une espèce sur quatre. Ce constat est à rapprocher de celui résultant de la Liste rouge des oiseaux menacés en France, publiée en mai 2011, qui est exactement le même : 26% des espèces nicheuses menacées. Étonnant vu que l’Île-de-France est l’une des régions les plus urbanisées d’Europe ? Pas franchement si l’on observe les chiffres de plus près : le taux d’espèces classées en “préoccupation mineure” est bien plus important dans l’Hexagone qu’en Île-de-France (62% contre 52%).
Quelles sont les raisons de ce déclin massif proposées par Natureparif ? Principalement le recul important de la qualité environnementale des secteurs agricoles, ainsi que la fragilisation des zones humides, qui reste un point noir partagé avec le reste du pays. Point positif - qui pourrait moins amuser les passants arrosés de guano - les espèces dites "spécialistes du bâti" se portent plutôt bien : parmi les treize existantes dans la région, seule une est considérée comme "quasi menacé", il s'agit du moineau friquet, probablement le plus rural de tous les spécialistes du bâti.

Le coquelicot hybride est en danger critique d'extinction. ©Sophie Auvert (CBNBP/MNHN)


Et hormis les oiseaux, qu’en est-il des autres représentants du vivant ? Sans surprise, ça ne va pas fort du côté des plantes. Natureparif, toujours en partenariat avec le Muséum et le Conservatoire botanique national du bassin parisien, a étudié, ces dernières années, plus de 1500 espèces de flore vasculaire (plantes à fleurs et fougères) indigène à l’Île-de-France. Il s’avère ainsi que, depuis le XVIIIe siècle, 85 de ces espèces ont tout simplement disparu (6% du total), 400 autres sont menacées (26%), dont 128 en risque majeur d’extinction durant les prochaines années (8%).
Les causes majeures du déclin restent les mêmes. Avancée du bâti, changement des pratiques agricoles et recul des zones humides. Ainsi, quelques espèces comme l’adonis d’automne ou la sabline sétacée devraient disparaître dans les années qui viennent. "Et alors" maugréera le lecteur blasé. Dans les villes, il y a moins de fleurs et d'oiseaux, rien de neuf sous le soleil, pas la peine d'en faire des tartines qui obstrueront mes neurones ! L'intérêt ? Ces listes extrêmement précises des espèces menacées - obtenues pour beaucoup grâce à des amateurs passionnées, chasseurs d'images et de bestioles - permettent de faire un point précis sur l'efficacité des programmes de sauvegarde d'espèces menacées. C'est ainsi qu'un oiseau emblématique comme la chouette chevêche a pu voir le nombre de ses représentants augmenter ces dernières années dans la région Île-de-France, grâce à ce type de programme. Côté plantes, le flûteau nageant ou les messicoles ont pu être secourus et sauvegardés. Reste maintenant à poursuivre ce genre d'action afin que la faune commune, celle que l'on n'observe parfois même plus, obnubilés que nous sommes par les espèces plus spectaculaires comme les éléphants, les requins ou les phoques, puisse revenir, parfois dans nos villes.

Julien Balboni

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